Fanny n’avait rien demandé à personne. Tout ce qu’elle voulait, c’était pouvoir lire tranquillement son nouveau livre de sortilèges, elle était à la recherche de nouveaux sorts, mais apparemment quelqu’un en avait décidé autrement. Et ce quelqu’un c’était Paige Dawnson, une fille de Serpentard une année en dessous d’elle. Imbue d’elle même et l’archétype de la parfaite sorcière de la bonne société, Fanny n’appréciait pas la jeune fille.

Elle avait déjà du se la coltiner durant son enfance, lors de ces très nombreux thés et autres événements organisés dans le but que la haute société sorcière se rencontre, échange les derniers potins et par la même occasion organise certains mariages. Heureusement pour elle, ce n’était pas dans les projets de ses parents de la fiancer à un parfait inconnu, même si elle soupçonnait que son père la voyait déjà épouser un fier highlander.

Lors de ces rencontres, la jeune Paige semblait faire tout son possible pour embêter les autres, en particulier ceux qu’elle avait dans son collimateur et  Fanny en avait été souvent la victime même si elle avait su riposter et Paige avait subit les conséquences de ses actes. On n’abîmait pas son album de coloriage favoris sans subir la colère de Fanny.

Mais c’était des chamailleries d’enfants et avec le temps elle aurait espéré que la Serpentard se calme. Que nenni, elle semblait avoir… empiré.

Elle soupira et lui arracha le livre des mains pour le rouvrir et poursuivre sa lecture.

« Si je suis si ennuyeuse pourquoi ne va tu pas voir ailleurs ? »

Elle se réinstalla et fit comme si Paige n’existait pas. Seulement la sorcière semblait ne pas vouloir en démordre, après tout elle était une Serpentard, ça elle ne pouvait nier qu’elle était tenace.
Elle leva les yeux de son livre et planta ses yeux sombres dans ceux de l’enquiquineuse.

« Ecoute si tu tiens tant que ça à vouloir m’embêter tu perds ton temps, je suis occupée, je n’ai pas le temps pour tes enfantillages. Va plutôt embêter le calmar, je suis sûr qu’il sera ravi de se faire une nouvelle amie. »

Bien, au moins c’était dit. Elle ne perdrait pas son calme, pas face à une fille qui avait été élevée dans la croyance qu’elle valait mieux que les autres parce qu’elle appartenait à une riche famille. Elle aussi et pourtant elle ne prenait pas tout le monde de haut comme ça.

Elle ne comprenait pas pourquoi elle s’évertuait à agir ainsi, elle ne se lassait jamais d’importuner les autres et ne semblait pas avoir un grand respect pour la hiérarchie.

Mais pour le moment Fanny avait autre chose à penser qu’à cette gamine prétentieuse. Les ASPIC occupaient son esprit même si ils étaient encore loin et son professeur d’astronomie lui avait promis de l’inviter à boire un thé dans son bureau pour discuter de ses choix d’orientation, apparemment il pouvait lui faire décrocher un stage qui serait un atout pour son avenir dans la recherche astronomique.

Pour le moment ce qui intéressait la Serdaigle, c’était de trouver des sortilèges qui lui permettraient de pouvoir condenser le plus de notes sur un seul parchemin sans qu’elle ne soit obligée de plisser les yeux et écrire en pattes de mouche.

Fanny replongea dans son livre, tendue. Mais par la barbe de Merlin c’était quoi son problème ?
Cette fille était une véritable plaie et le pire, c’est que Fanny l’ignorait la plupart du temps, elle n’en valait pas la peine. Elle n’arrivait même pas à la détester pleinement. Elle ne l’aimait pas, ça c’était sûr et certain mais elle ne cherchait pas à s’en faire une ennemie. C’était Paige qui avait décidé que ce serait la guerre entre elles.

Elle se crispa un peu plus quand elle entendit Paige la traiter de « déception ». Ce n’était pas vrai bien entendu, elle savait que sa famille n’avait jamais été déçue d’elle. Son admission à Serdaigle n’avait presque pas posé de problème, seuls quelques membres éloignés de sa famille aurait voulu la voir à Serpentard et même sa mère avait été contente pour elle, alors que Fanny savait qu’elle priait très fort pour qu’elle suive ses traces chez les verts et argents. Mais l’intérêt de Fanny pour les livres et sa passion démesurée pour l’astronomie ne trompait personne. Serdaigle était la maison qui convenait le mieux à Fanny, il n’y avait aucun doute là dessus.

Et pourquoi elle prêtait attention à ce que disait Paige. Elle n’avait plus six ans, elle n’était plus la petite fille timide qui s’agrippait de toutes ses forces à sa poupée et qui se réfugiait dans l’atelier de son père pour avoir la paix.

Elle s’apprêta à répliquer, à lui demander de déguerpir ou mieux, de partir, même si elle se doutait que Paige la suivrait, mais au moins elle aurait tenté quelque chose. A bien réfléchir elle préférait quand c’était Sirius qui venait l’embêter, au moins il était gentil et ne se permettrait jamais de l’insulter ou d’insinuer quoi que ce soit d’aussi négatif sur elle. Et puis, même si elle l’admettrait jamais à haute voix, il la faisait rire.

Mais Paige avait une idée en tête, sournoise et avant que Fanny ne puisse réaliser quoi que ce soit, elle vit son livre de sortilèges lui être arraché des mains. L’instant d’après, le livre disparaissait dans le lac en un magnifique plouf qui provoqua la colère de Fanny.

Que Paige vienne l’enquiquiner elle pouvait le supporter et même le concevoir, après tout elle ne vivait que pour ça.
Que Paige l’insulte elle pouvait plus ou moins encaisser.

Mais que Paige ose s’en prendre à un de ses livres, ça c’était autre chose. C’était un sacrilège doublé d’une déclaration de guerre.

Fanny ouvrit la bouche, incapable de dire quoi que ce soit. Autour d’elle certains élèves avaient vu le livre être lancé en plein milieu du lac. Il y eu quelques rires et des mines choquées.

Fanny resta incrédule un bon moment, incapable de faire autre chose que de fixer le point du lac où le livre avait atterrit.

Puis elle repris l’usage de la parole.

« Toi ! Espèce de sale harpie ! Tu ne paies rien pour attendre ! »

Elle s’était mise à hurler et désormais tout le monde les observaient. Paige avait une mine satisfaite.
Sans prévenir et sans qu’elle ne puisse le sentit venir elle même, le poing de Fanny s’abattit sur le nez de Paige.  

Elle n’attendit pas sa réaction et en l’espace de quelques secondes, la Serdaigle avait retiré sa robe d’uniforme, ses chaussures et s’enfonça dans le lac avant de plonger dans l’eau, froide, bien déterminée à récupérer son bien. Elle avait repéré l’endroit où le livre se situait, pas bien loin heureusement, mais assez profond.

Elle remonta à la surface pour reprendre une bouffée d’air, avant de replonger illico. Son petit manège dura quelques minutes, le temps de réaliser qu’elle n’arrivait à rien. Elle n’était pas bonne nageuse et l’eau était trouble.

Au loin elle entendait les encouragements de certains élèves et des sifflements. Enhardie, la Serdaigle décida d’agir comme une vraie Serdaigle. Elle avait plongé avec sa baguette, mais dans la précipitation et la colère, n’avait pas pensé à s’en servir. Elle inspira un bon coup, avant de la pointer sur son visage et de prononcer la formule du sort de têteenbulle.

Maintenant protégée et pouvant respirer sous l’eau, Fanny replongea, se moquant bien d’avoir quelque chose ressemblant à une méduse sur la tête. Elle avait du mal à s’enfoncer dans l’eau et mais ne craignait pas de tomber sur un strangulot ou un être de l’eau, Paige avait du oublier que sa mère étudiait les milieux aquatiques.

Fanny battit des jambes et s’enfonça plus profondément. Elle prononça un lumos et tourna la tête plusieurs fois, avant de le repérer, gisant, malheureux, entre deux rochers. Ignorant les poissons, Fanny referma sa main sur le livre et s’en empara, avant de regagner la surface, avant que certaines créatures ne vienne s’intéresser à elle et que son sortilège ne s’estompe.

Quand elle sortit la tête hors de l’eau, brandissant son livre, il y eu des applaudissements, que Fanny ignora.

Elle regagna les abords du lacs et se laissa tomber à genoux dans l’herbe, tachant de reprendre sa respiration.

Fichu. Son livre était fichu. Elle n’était même pas sûre que la magie puisse faire quoi que ce soit là-dedans. Ce n’était plus qu’un tas informe, dont les pages se déchiraient. De la bouillie.

« T’es folle MacDougall ! »

Elle ignora le commentaire de la fille qui venait de le dire, elle ne savait même pas qui avait prononcé ça.

La respiration hachée, trempée, sale, Fanny se dirigea d’un pas menaçant vers la Serpentard qui se tenait encore le nez. Autour d’elles, plusieurs élèves reculèrent.

« La vache MacDougall, t’aurait du tout retirer ! »

Elle se retourna vers le garçon de Gryffondor qui venait de parler. Si elle avait eu des couteaux à la place des yeux, le pauvre garçon serait déjà mort.

C’est vrai que son uniforme trempé laissait apparaître, à sa plus grande gêne, son soutient-gorge et la moulait un peu trop.

Mais ce n’était pas le problème. Pour le moment.

Fanny pointa sa baguette sur Paige.

« T’as aucune idée de ce que tu viens de faire. Tu vas le regretter si amèrement que tu préféras passer le reste de ta scolarité en retenue avec Rusard. »

Fanny ne s’était jamais sentie aussi en colère. Elle se moquait bien d’écoper d’une retenue. Paige aller regretter son geste.

Autours d’elle, les élèves prenaient déjà les paris.  

Fanny se retrouvait dans état qu’elle ne comprenait pas elle-même. Enfin si, quand même un peu. Son livre, son précieux livre. Pour le commun des mortels, il était difficile de comprendre à quel point elle aimait lire, en dehors de l’astronomie.
Dès qu’elle avait su lire, elle avait entreprit de lire tout ce qui se trouvait à sa portée, des Contes de Beedle le barde, par encyclopédies diverses, les biographies de peintre de son père, les livres des milieux aquatiques de sa mère et même les livres de recettes, au grand désespoir des elfes, qui se retrouvaient parfois sans rien pour préparer les repas et qui n’osaient pas toujours aller lui réclamer qu’elle leur rende le livre.

Les livres s’était sacré pour elle.

Et puis c’était surtout Paige. Fanny ne l’aimait, elle ne l’aimait pas, et c’était sans doute leur unique point commun à elles deux. Mais dans le cas de Fanny, c’était surtout de l’exaspération et de l’indifférence qu’elle ressentait à son égard. Les allures de princesse pourrie gâtée de la Serpentard l’agaçait mais la plupart du temps elle l’ignorait, ne prêtait pas attention à elle, bien trop obnubilée par son univers à elle, fait d’étoiles et de planète inexplorées.

Mais c’était justement ça que Paige ne supportait pas, qu’on l’ignore…

Alors quand Paige l’avait provoquée, une fois de plus, une fois de trop, Fanny s’était soudain mise en colère, véritablement. En fait c’était comme si elle avait oublié toute raison et qu’elle avait décidé de faire payer à la blondinette toutes ces années de provocation et de méchanceté, tout ça en un coup de poing et un plongeon dans le lac.

Malheureusement pour Fanny cette dernière action n’avait eu aucun effet, sauf de constater que son livre était fichu, définitivement, mais surtout de se retrouvée trempée, devant tout le monde et sûrment la cible des commérages pour les prochains jours. Tant pis, ce n’était pas comme si elle n’avait pas l’habitude des moqueries.

Elle regarda avec une certaine satisfaction, qui l’effraya même un peu, Paige se tenir le nez, tentant tant bien que mal de retenir le sang qui coulait le long de son nez et qui tâchait désormais son uniforme. Mais elle n’esquissa aucun sourire, aucun signe de joie.

Elle était furieuse, comme prise d’une rage folle. Paige pouvait bien se moquer d’elle, elle s’en fichait. Elle ne baissa pas sa baguette, tant pis si on les surprenaient. Elles seraient punies toutes les deux.

« C’est toi qui as commencé, pas moi. Tu l’as bien mérité. Et je suis peut-être folle mais au moins je ne suis pas une connasse narcissique comme toi. Je me fiche d’être mise en retenue, ce n’est pas mon problème et si tu penses que tu t’en tireras tu te mets le doigt dans l’œil. Parce que je ne pense pas que les professeurs seront dupes dans cette histoire, tout le monde sait que tu n’es qu’une sale peste. C’est toi qui a un comportement de débile. C’est toi qui est venue me chercher, m’embêter comme si on avait six ans, c’est toi qui a lancé mon livre dans le lac. Tu as eu de la chance que je ne brise pas toutes tes petites dents et de ne t’en sortir qu’avec le nez en sang. J’en ai ma claque de toi, t’es pire qu’une verrue vraiment. Je préférerais cent fois passer une soirée complète en compagnie de Rusard qu’une minute de plus avec une petit conne comme toi. En plus tu devras t’expliquer avec le professeur Flitwick, c’est lui qui m’a prêté ce livre, alors si tu penses éviter une retenue tu te trompes, parce qu’on sait très bien toutes les deux qui il va croire. Pas une chieuse comme toi en tout cas. Et je te préviens si on est en retenues ensemble t’auras pas intérêt à me faire chier sinon je m’arrange pour que tu ne puisse plus jamais manger quoi que soit de solide jusqu’à la fin de ta pauvre vie. »

Fanny baissa légèrement sa baguette, la respiration hachée. Elle se faisait un peu peur à elle même. Jamais elle n’avait parlé de la sorte à quelqu’un, même pas à cet idiot de cousin qui cherchait à la faire pleurer par tous les moyens à chaque visite.

Autour d’elles les élèves les fixaient, guettant chaque réaction, se plaçant du côté d’une des jeunes filles en guise de soutient. Elle savait que la plupart n’attendaient qu’une chose, c’était qu’elles se bagarrent. Sauf que maintenant qu’elle avait dit tout ce qu’elle avait sur le cœur, Fanny n’avait aucune envie de se battre, elle ne savait pas si elle ferait le poids face à Paige même si cette dernière ne semblait pas très forte non plus.

Non là elle avait dit tout ce qui lui pesait depuis un moment et malgré ça sa colère n’était toujours pas tombée, bien au contraire. En fait elle avait même envie de pleurer. Son livre. Enfin celui du professeur Flitwick mais c’était tout comme, il lui avait prêté et elle avait juré de faire attention. Elle ravala ses larmes, elle n’allait pas se mettre à pleurer, ça ferait trop plaisir à Paige. Et elle n’allait pas non plus lui tourner le dos, hors de question. Elle allait attendre qu’elle réplique, qu’elle s’excuse même si elle en doutait, qu’elle fasse quelque chose. Qu’elle prenne conscience de son comportement puéril. Mais elle ne détournerait pas le regard.

Elle baissa sa baguette, sentant sa colère retomber doucement. Oh elle était toujours aussi furieuse mais maintenant que le pression était retombée, elle recommençait à vouloir agir comme une Serdaigle, avec sa tête et non avec ses poings, comme un Gryffondor, ce qui était, elle devait l’avouer, une attitude stupide.
Mais elle avait éprouvé une étrange satisfaction en voyant le nez de Paige craquer légèrement et la voir se mettre à saigner du nez. Elle lui avait fait payer d’une certaine manière, toutes ces années de tourmente. Elle ne la comprenait pas. Pourquoi agissait-elle de la sorte, comme une enfant ? Qu’elle vienne parfois lui chercher des noises, l’agacer encore… mais jeter son livre dans le lac ? Ou même n’importe quel autre objet, juste parce qu’elle l’avait ignorée, avait eu la bonne attitude en fait, de ne pas rentrer dans son jeu.

Mais Paige n’avait aucunement l’air impressionnée. Elle devait s’en douter. D’une certaine façon c’était un trait de caractère admirable. Mais comme elle l’utilisait à mauvais escient.
En revanche la tirade qui s’en suivit lui fit l’effet d’un coup de poing à elle aussi. Elle devait avouer qu’elle encaissait très difficilement les reproches qui lui étaient adressées. Parce qu’il y avait une part de vérité la dedans, elle était seule, toujours plongée dans les livres et cette réflexion lui faisait un peu mal, mais pas moins que celle concernant le fait qu’elle soit une déception et que personne ne souhaitait être avec elle.

C’était si blessant. Et criant de vérité d’une certaine façon. Elle était une solitaire, c’était dans sa nature et elle devait avouer que tout le monde le lui fasse remarquer était si agaçant. Oui elle ne cherchait pas particulièrement la compagnie des autres et préférait sans aucun doute celle des étoiles. Qu’elle n’avait pas beaucoup d’amis, elle n’avait en fait même pas une ou un meilleur ami. Et c’était parfois pesant, mais qu’y pouvait-elle, si se retrouver entourée de monde l’angoissait et qu’elle ne comprenait pas le fait de vouloir à tout prix être populaire, comme Paige le cherchait ?

Elle ouvrit la bouche pour parler mais aucun son n’en sortit. Autour d’elle les élèves commentaient la dispute. Il y avait ceux du côté de Paige et ceux de son côté et le fait de savoir ça lui donna un peu de courage pour se défendre.

« Arrête. Arrête ça tout de suite. C’est toi qui a un comportement démesuré depuis toujours, tu te prends pour la reine mais en réalité tu es juste comme nous, une élève parmi tant d’autres, tu ne laisseras pas de marque particulière à Poudlard. Et ne te fais pas d’illusions, tu es en réalité aussi seule que moi tu vois. Tu es entourée de petits faire-valoir, de gens qui te craignent et c’est tellement plus pathétique, parce que le jour où tu auras vraiment besoin d’aide tu n’auras personne, parce que personne ne voudra t’aider et crois moi tu le regrettera. Ces gens qui t’entourent s’en fichent de toi au fond, ils t’obéissent juste. Pour le moment tu penses que c’est amusant et que ça te suffit mais le jour où tu seras vraiment seule et abandonnée de tous, tu le regretteras amèrement.
Et je préfère largement ne plus rien avoir à faire avec des gens qui pensent qu’ils valent mieux que les autres à cause de leur naissance. Vous me dégoûtez, vous ne valez pas mieux que n’importe qui, vous n’avez rien fait de particulier sinon de naître. Vous êtes si étriqués, si coincés dans votre manière de vivre, c’est affligeant. »

Fanny se mettait en danger en disant ça, mais elle ne supportait vraiment pas d’entendre des dicours de ce genre. Qu’est-ce que la famille de Paige avait fait de si particulier pour se sentir aussi puissante, aussi haute et se sentir supérieure à d’autres familles ? Mis à part des mariages arrangés, rien du tout.
Elle se tendit légérement en la sentant se rapprcoher d’elle. Mais elle ne bougea pas.

« Tu es contente alors ? Tu as eu ce que tu voulais aussi ? Je devrais me réjouir alors, j’ai fais une bonne action dans un sens. Mais je n’ai pas le moins du monde envie de rentrer dans tes jeux stupides. En fait je te plains, mis à part embêter les autres tu ne sais rien faire, tu n’as que le nom de ta famille pour prétendre à quelque chose. »

Sa voix était devenue plus froide. Elle recula légèrement pour la toiser, glaciale.

Elle n’avait jamais compris Paige. Jamais. Depuis qu’elle la connaissait, et ce depuis presque toujours, elle se prenait pour une espèce de diva, prenait tout le monde de haut. Elle se demandait ce qu’il se passerait le jour où elle tomberait de son piédestal, le jour où elle quitterait enfin Poudlard et découvrait sûrement un monde beaucoup plus cruel et sans pitié qu’elle. Elle n’avait sans doute encore jamais joué dans la cour des grands. Ça ne lui ferait pas de mal néanmoins de tomber de haut, de chuter de son trône imaginaire. Elle pensait être la reine de tout Poudlard ? Mais par Morgane, cette fille était encore plus déconnectée de la réalité qu’elle. Elle vivait peut-être dans les étoiles, mais elle avait les pieds sur Terre.

La faute à une société sorcière trop stricte et basée sur les apparences, les conventions sociales, la pureté du sang. Le jour où tout ça s’effondrerait, le jour où tout ça n’aurait plus aucune importance, alors elle plaignait sincèrement ceux qui se complaisaient dans cette manière de vivre et de penser. Que feraient-ils ? Ils ne sauraient pas rebondir, elle les voyaient mal aller vers les moldus, ça serait bien au trop dur, bien au-dessus de leurs forces pour eux. Ils s’éteindraient. Et leurs noms, leurs mémoires avec eux. Plus rien.

« Qu’une question de temps ? Vraiment ? Alors tu ne feras donc que ça ? Te marier avec un quelconque dadais au sang pur qui n’aura pas eu le choix et qui n’aura que son nom à t’offrir et rien d’autre ? »

C’était triste. Fanny ne courrait pas après l’amour, pour le moment ce n’était pas sa plus grande préoccupation, mais peut-être qu’un jour, elle rencontrerait quelqu’un qui réussirait à lui faire détourner la tête des étoiles et cette personne mériterait alors tout son amour pour cet exploit. C’était sans doute un peu idiot, mais qu’importe, il n’y avait rien de mal à vouloir vivre une histoire d’amour, peu importe sa nature, du moment qu’elle convenait aux concernés, pourquoi juger ?

Mais pour les personnes comme Paige, pour les personnes venant de familles comme les Black ou les Malfoy… que des mariages arrangés, sans un soupçon, sans une seule étincelle d’amour entre les deux, ni même un semblant d’amitié ou de respect. C’était si décevant et si triste. Déprimant dans un sens. Elle perdit un peu de son air froid pour regarder la petite blonde avec ce qui lui semblait être de la pitié. Ou bien de la compassion ?

« Tu es vraiment sûre de ce que tu dis, où ce n’est pas une de ces idioties qu’on t’as enfoncé dans le crâne. Si tu aimes tant la solitude comme tu dis, pourquoi vouloir imposer une marque. C’est ce que tu te persuades pour le moment, ça te convient. Soit. Mais un jour, peut-être, je ne te le souhaite pas, tu te retrouveras vraiment seule, tu auras besoin d’aide. Mais il n’y aura personne, juste du vide, ce vide que tu es en train de créer toi-même autour de toi. Personne ne sera là pour venir t’aider, te pleurer, personne ne versera une seule larme, il y aura juste de la pitié. Tu as peut-être raison, tes mots m’ont blessée, c’est vrai. Je le reconnais. Je n’ai peut-être que les étoiles pour me tenir compagnie, mais au moins j’ai quelque chose, un but concret auquel me raccrocher. Qu’as-tu d’autre toi ? Mis à part ta popularité qui ne sera jamais éternelle ? »

Plus elle y pensait, et plus le destin, le futur soit-disant parfait que Paige voulait se construire lui faisait de la peine. Elle était ambitieuse certes, mais sans doute pas autant que certains. Elle voulait la grandeur, la gloire… mais tout ça, c’était aussi éphémère. Comme les étoiles. Elles ne brillaient jamais éternellement. Elle finiraient par s’éteindre un jour où l’autre, continueraient de briller un peu avant leur mort avant de totalement disparaître.

Elle se sentit soudainement chanceuse et se mit à sourire, sa colère s’envolant petit à petit. A quoi bon, après tout, s’énerver après elle ? A quoi bon crier ?
Ça ne servait à rien. Pas avec des causes perdues comme elle. Elle n’était que faux sourires et apparence.