when I close my eyes I pretend I'm alright
Anybody out there ?
'Cause I don't hear a sound
Le soleil brille à son zénith au dessus du lac. Des reflets infinis miroitent à sa surface, comme d'autant de constellation abîmées dans l'eau d’apparence calme. Evan se promène depuis quelques minutes afin de profiter des rayons solaires qui illuminent les traits fatigués de son visage. Encore une nuit à réfléchir. Encore une nuit à faire des plans sur la comète. Encore une nuit comme les autres, en somme. Les cernes sous ses yeux contrastent avec son visage juvénile. Un adolescent ne devrait pas avoir autant de cernes et de rides soucieuses barrées sur le front. Mais un adolescent ne devrait pas non plus être livré au mage noir le plus dangereux du siècle.
Ses pas l'amènent au bord du lac, parfaitement désert. Evan respire un grand coup, profitant de sa solitude. Il aime se retrouver ici, seul, sans personne à qui parler. Ça lui fait du bien de se retrouver là, pendant que les autres élèves déjeunent dans la grande salle. Depuis quelques années, c'est ici qu'il vient pour se ressourcer et penser à autre chose. Près du lac, tous ses soucis s'envolent. Son père, le seigneur des ténèbres, son futur chez les Mangemorts, la double vie qu'il mène... plus rien n'a d'importance. Evan sait qu'il devra affronter ses démons intérieurs, un jour. Mais pas aujourd'hui. Aujourd'hui, il compte bien profiter de cette quiétude, aussi artificielle soit-elle.
Il décide de s'arrêter quelques instants et de s’asseoir, histoire de contempler le paysage qui se dessine sous ses yeux. Il aimerait tellement partager ça avec sa mère. Lui raconter à quel point le lac est magnifique quand le soleil l’inonde. Lui parler de ses mésaventures, entre deux silences. Mais elle n'est plus là, et il est seul à présent. Définitivement seul. A l'abri des regards indiscrets, Evan se laisse submerger par la tristesse qui lui vrille l'estomac depuis que sa mère est morte. Une larme silencieuse coule le long de sa joue droite, une larme qu'il essuie presque aussitôt, par réflexe. La voix de son père résonne dans son esprit, froide et insensible.
Les Rosier ne pleurent pas. Et pourtant, cette larme était bien réelle. Palpable. Comme la douleur qu'il ressent presque constamment. Evan se dit parfois que la tristesse s'en ira d'elle même lorsqu'il deviendra un Mangemort. Après tout, les Mangemorts ne ressentent presque rien, si ce n'est la haine intense qui envenime leur sang. Ce n'est pas pour rien si la majorité d'entre eux ne peut pas produire de patronus. Pourquoi espérer et ressentir des choses lorsqu'on peut tout détruire sur son passage ? Alors ouais, si la souffrance peut disparaître en adoptant les ténèbres... il finira probablement par s'y noyer. Et son père aura gagné. De toute manière, il gagne toujours, et Evan le sait très bien depuis le temps.
Il ne pourra pas échapper à ses obligations toute sa vie. Il ne pourra pas tout envoyer en l'air sans se soucier des conséquences. Il ne pourra pas aimer la personne de son choix. Tout ce qu'il peut faire, c'est profiter de sa liberté tant qu'elle existe encore. Et là, près du lac, il se sent libre. Mieux, il se sent vivre. Alors il attrape sa baguette magique, qu'il serre doucement entre ses doigts avant de prononcer une formule magique apprise un an plus tôt.
«
Expecto Patronum. »
Un coyote s'échappe soudain de l'extrémité de sa baguette magique et commence à courir sur le lac, comme s'il voulait se défouler après une longue hibernation. Evan esquisse un sourire. Tant qu'il peut produire un patronus, cela signifie que son cœur n'est pas impur. Un signe évident qu'il n'a rien à voir avec les Mangemorts. L'espoir est toujours là, dans ce coyote qui brille d'une lumière aveuglante.