♫

« Vous n’oublierez pas de lire cet article sur la machine à vapeur, j’interrogerais des élèves pour le prochain cours. »

Jane posa un regard sévère sur les élèves de quatrième année qui hochèrent la tête en signe d’accord, l’air peu enthousiastes.

Elle peut difficilement leur en vouloir, elle non plus n’aime pas ce chapitre du programme, mais il est obligatoire et sera sûrement un sujet d’examen, comme d’ordinaire.

Cependant elle est la professeur et elle ne doit rien laisser paraître devant ses élèves ou presque. Ces derniers temps sa langue se délie malgré elle et elle a bien du mal à rester professionnelle alors que dehors les gens disparaissent et les attaques se multiplient. Elle lit de l’inquiétude dans les yeux des enfants et ça l’attriste. Ils ne devraient pas, pas maintenant c’est trop tôt.

Mais parfois il lui arrive de délaisser le programme pendant un ou deux cours et elle leur parle, de tout et de rien. D’un groupe de musique, un film ou même d’un événement marquant dans le monde moldu, il y en a tant en ce moment, même les sorciers ne peuvent les ignorer.

Et parfois elle leur parle juste d’elle, d’eux. Elle les laisse s’exprimer, sans crainte, sans peur d’êtres jugés pour ce qu’ils sont, ce qu’ils aiment ou non. Elle ne veut pas qu’ils aient peur de se confier et surtout elle veut leur apprendre à s’aimer.

Elle sait bien que c’est impossible d’aimer tout le monde, elle n’est pas naïve à ce point mais elle se dit que ce n’est déjà pas mal, d’essayer éradiquer un peu de haine dans ce monde.

La cloche sonne et les élèves quittent la salle pour se rendre à un autre cours. Sa journée à elle est terminée, elle va pouvoir souffler un peu, ces derniers temps elle se sent un peu fatiguée. Le travail sûrement, elle n’arrête pas, elle se démène comme une folle, c’est à peine si elle a eu le temps de répondre aux lettres de Bertie.

Elle aimerait que cette fatigue soit toute autre, qu’elle soit liée à un autre événement plus heureux, mais comme d’habitude son ventre reste plat et Mme Pomfresh lui annonce avec tristesse qu’elle n’attends pas d’enfant.

Plongée dans ses pensées, Jane ne remarque pas tout de suite la présence d’un élève dans l’embrasure de la porte.

C’est quand elle lève enfin la tête de son bureau que Jane le voit. Regulus Black. Aussitôt elle sourit.

« Regulus ! Comment vas-tu ? Tu as besoin de quelque chose ? »

Elle cache difficilement son affection pour le petit dernier de la famille Black. Si Sirius est rouge bravoure et or insolent, Regulus est vert innocent et argent douceur.

Il est si différent de son frère, si calme par rapport à lui. Ce n’est pas une mauvaise chose. Ça lui fait penser à John et Bertie, à les voir personne ne penserait qu’ils sont frères, ils sont si différents.

Elle s’approche de lui et pose une main sur son épaule.

« J’ai l’impression que tu as besoin de parler je me trompe ? Aller viens dans mon bureau, je vais faire du thé. A moins que tu ne préfère un chocolat ? »

Ce n’est pas anodin si Jane propose à Regulus de venir lui parler dans un endroit plus privé, plus discret. Elle connaît la réputation de la famille Black et ne tient pas à ce que Regulus aie des ennuis en lui parlant, elle la professeur d’étude des moldus.  

Elle conduit Regulus jusqu’à son bureau situé derrière sa salle de classe et referme la pote derrière eux. Au moins ils seront tranquilles, surtout si Regulus veut se confier, comme il le fait parfois avec elle.

Cette marque de confiance la touche plus qu’il ne peut l’imaginer.

« Allez, installe toi, c’est mieux pour parler non ? »

Elle sourit une nouvelle fois, avec douceur. Elle ne veut pas le forcer, mais tout comme avec son frère, elle sent bien que quelque chose ne va pas.

Alors elle y va en douceur, pour ne pas le brusquer. Elle s’en voudrait si quelque chose de terrible lui arrivait, de n’avoir rien fait pour lui, lui qui est , d’une certaine façon, l’incarnation de l’enfant qu’elle rêve d’avoir mais qui n’arrive pas.

♫

Elle pose un regard curieux et attendrie sur le cadet des Black. Il lui semble si timide, si fragile. Elle lui trouve un air adorable.
Oh comme elle aimerait avoir un enfant comme lui, comme son frère, comme ses élèves. Ils sont tous si gentils. Du moins avec elle, mais il faut dire qu’elle a de la chance que sa matière soit une option, un choix, et non une matière obligatoire. Les élèves qui sont dans son cour le sont parce qu’ils sont intéressés, elle est heureuse de leur faire connaître de son monde et elle a l’impression qu’ils le lui rendent bien.
Du moins elle n’a jamais eu à se plaindre d’un élève trop insolent ou trop feignant, mais peut-être est-ce parce qu’ils savent qu’elle est toujours à l’écoute, qu’elle laisserait tomber sa musique, si chère à son coeur, pour leur accorder quelques minutes de son temps.

Un sourire jaune soleil pour le jeune Black et elle le sent un peu plus détendu.

« Bien, que veux tu savoir ? N’hésite surtout pas, j’essayerais de t’aider dans la mesure du possible. »

Elle se demande bien ce qu’elle pourrait lui apprendre, mais elle est contente qu’il décide de se tourner vers elle, de lui accorder sa confiance et non de tout garder pour lui. Elle ne comprends pas ce maque d’empathie dont font parfois preuve ses collègues, encore un fossé entre elle et eux, mais elle préfère ne pas y penser pour le moment, ce qui lui importe c’est Regulus, elle doit se focaliser sur lui et non elle même, ça serait égoïste.

Elle referme la porte de son bureau derrière elle, jetant un vague coup d’oeil à la pièce légèrement désordonnée. Un de ses plus grands défauts, elle n’avait aucun sens de l’ordre ou de l’organisation, au grand dam de son fiancé, mais ça allait encore, la pièce était encore présentable. De toutes les façons ce n’était pas aujourd’hui qu’elle allait devenir une parfaite ménagère, alors autant de ne pas persévérer dans ce domaine là.

« Je vais faire du thé alors ! Du thé vert, ça te va ? Ne t’inquiète pas, tu ne me déranges pas, j’ai toujours du temps pour écouter les autres. Ce n’est pas parce que je ne suis pas ton professeur que je ne peux pas prendre un peu de temps pour toi voyons ! »

Elle lui adresse un autre sourire, avant de se tourner vers la théière qui repose dans un coin de la pièce. Elle utilise sa baguette pour allumer un petit feu en dessous, afin de faire chauffer l’eau, mais se sert de ses mains pour sortir et préparer le thé, ainsi que quelques biscuits au chocolat qu’elle dispose dans une petite assiette.

Une fois le thé prêt, elle s’installe en face de lui, pousse une tasse vers lui et l’enjoint à prendre un biscuit si il en a envie.

« Sur les moldus ? Vraiment ? »

Elle marque une pause, surprise. Elle ne s’attendait pas à ça. Non qu’elle pense que Regulus soit comme certains sorciers qui la méprise parce que ses parents étaient des moldus, au contraire, le jeune serpentard n’est que douceur, elle ne l’a jamais vu montrer un quelconque signe de mépris envers les né-moldus. Mais sa curiosité la surprends. Elle ne s’attendait pas à ce genre de conversation mais soit.

« Tu as parfaitement le droit d’être curieux, mon fiancé dit tout le temps que c’est en étant curieux qu’on apprends. Alors ? Tu aimerais savoir quelque chose en particulier ? Sur le mode de vie des moldus, sur leurs inventions ? N’aie pas peur, je n’en parlerais à personne, je te le promets. »

Promesse vert tristesse, jaune loyauté. Elle n’en parlera pas, surtout pas à Horace, elle ne veut pas attirer d’ennuis à qui que ce soit. Elle sent de la timidité dans sa voix, avec une pointe d’assurance. Elle comprends que venir jusqu’ici a du lui coûter beaucoup. Elle ne sait pas grand-chose des familles sorcières, de leur mode de vie, elle ne sait qu’une chose, la plupart et surtout la famille Black, prônent la supériorité du sang.

Mais il semblerait que leurs enfants ne soient pas d’accord là dessus. Tant mieux, c’est jaune espoir dans son coeur. La haine n’a pas atteint leurs coeurs, leurs âmes. Il n’est pas trop tard.