La salle commune des Gryffondor a toujours été un des endroits préférés de Sirius et pourtant, ces derniers temps, elle était surtout devenue le théâtre où se jouait ses longues nuits d’insomnie. Il passait tant de temps dans cette pièce qu’il était capable d’en décrire chaque élément, chaque couleur, et chaque imperfection. Lui même commençait à faire partit du décors parmi les autres maraudeurs tous occupés à discuter gaiement de choses et d’autres. Le jeune homme n’écoutait que d’une oreille James lui exposer son dernier plan pour réussir à attirer l’attention de Lily. Tout ça lui paraissait tellement futile depuis qu’il avait apprit ce qu’il adviendrait à l’avenir et du funeste destin qui attendait son meilleur ami. Remus, quant à lui, essayait d’aider Peter à faire ses devoirs, et ça, Sirius préférait l’ignorer. Il ne fallait surtout pas qu’il cède à la tentation d’égorger son camarade en plein milieu d’une salle remplie d’élève. En réalité, il fallait pas qu’il ne l’égorge du tout. L’histoire devait suivre son cours pour que les choses puissent se dérouler comme cette Lindsay les avait présentées à Sirius. Autrement, il pourrait aggraver l’avenir en modifiant les choses pour le pire.

Le feu crépitant dans la cheminée, Peter finit par remercier Remus avant de remonter dans le dortoir, certainement déjà fatigué. James, de son côté, s’amusait à envoyer des petits morceaux de papier brûler dans la cheminée, espérant réussir un tour qu’il avait mit au point pour que les flammes changent de couleurs, mais comme il n’était bon ni en potion, ni en botanique, aucun de ses essais ne fonctionnaient. Fatigué de tout ça, Remus finit par le gronder, et tout deux montèrent, après avoir demander à Sirius de les suivre. Le jeune homme s’était contenté d’un petit sourire et d’un geste de la main pour le faire comprendre qu’il monterait plus tard. Son regard se reposa à nouveau sur le feu dans la cheminée. Quelque part, regarder la flamme avait quelque chose d’apaisant. Au moins, en fixant la cheminée, il n’avait pas besoin de repenser à sa relation chaotique avec son frère ni à ce traitre qu’il dormait dans le lit à côté du sien. Ces quelques instants qu’il voilait soir après soir étaient comme une libération pour le Gryffondor.

La salle commune s’était entièrement vidée quand une voix vint à ses oreilles et attira son attention. Doucement, Sirius releva la tête sur une jeune rousse qu’il ne connaissait que trop bien maintenant. Un grand sourire vint se poser sur les lèvres du jeune homme alors qu’il attrapait la tasse de chocolat qu’elle lui tendait. « Merci, Peyton » Le jeune Black souffla doucement sur le liquide encore chaud. Le chocolat, c’est une de ses choses qu’il a découvert quand il était arrivé à Poudlard, et quel bonheur ce fut de le découvrir ! Sans le vouloir, Sirius avait suivit du regard la jeune femme qui était allée s’assoir près de la fenêtre. « Tu peux venir près de la cheminée, tu sais ? » Avait-dit, sans vraiment réfléchir. Pendant des années, il avait vu la demoiselle fuir à chaque fois qu’il approchait, et petit à petit, elle avait fini par réellement piquer sa curiosité. « Sauf si tu as toujours peur de moi. »

En soit, et à sa plus grande honte, Sirius était forcé d’admettre que l’image que Peyton avait eu d’eux n’était pas totalement erronée. Il était vrai que Sirius avait été un bourreau pour certains, et que bien souvent, ce qu’il pensait n’être que des plaisanteries, était en réalité bien pire que ça, et il perdait le contrôle de sa créativité destructrice. Pourtant, il n’avait jamais réellement eu l’intention de faire du mal à qui que ce soit. Il posa son regard sur la tasse qu’il tenait entre ses mains. Il aurait aimé pouvoir dire qu’elle avait tord, mais ça aurait été un mensonge, et le Gryffondor n’avait plus véritablement la force de mentir. Il prit un léger instant avant de relever la tête vers la jeune femme, lui servant son plus beau sourire, bien qu’il ne fut pas plus sincère que toutes les autres fois où il le faisait. « Je suis vraiment désolé pour ce que tu as vécu dans ton ancienne école. C’est stupide, surtout que tu es pas… Enfin je veux dire que tu es plutôt… Euh… Enfin, tu vois… » D’un coup, le jeune homme se sentit stupide, ne pouvant finir cette phrase sans se montrer à la hauteur de sa réputation ou sans risquer de la vexer.

N’ayant aucune solution pour sortir de cette situation, Sirius se contenta de porter à ses lèvres sa tasse et d’en boire une gorgée, profitant des précieuses secondes qu’il avait gagné pour formuler quelque chose de cohérent et de correct. « Je voulais dire qu’on ne devrait pas juger quelqu’un seulement pour son apparence physique. C’est nul. » Il n’était pas sûr que c’était réellement mieux mais au moins, il n’avait pas fait de gaffe, et ça, c’était déjà une victoire en soit. « Et puis Severus, tu as raison. J’ai été abominable avec lui, et je devrai vraiment aller lui présenter des excuses même si je doute qu’il puisse pardonner le dernier tour que je lui ai joué… » Et Sirius le comprenait. Comment Severus aurait pu le pardonner d’avoir failli causer sa mort ? Ce qu’il pouvait être stupide parfois ! A nouveau, le jeune homme porta la tasse à ses lèvres et en but une gorgée. Malgré ce sentiment de honte qui l’envahissait, Sirius mourait pourtant d’envie de parler à la jeune femme sans pour autant réussir à l’admettre.

« Je m’appelle Sirius Black, au faite. » Dit-il, pour se présenter même s’il était évident que la jeune femme connaissait déjà son prénom. Après tout, il n’existait pas une seule personne à Poudlard qui n’avait jamais entendu parler du tristement célèbre Sirius Black. « Et même si je ne peux pas prétendre comprendre ce que tu vis, je sais ce que c’est de pas avoir une enfance facile. J’ai pas un nom très facile à porter. Ma famille… Et bien, comment dire. Disons qu’ils font partis de ses idiots qui pensent que la pureté du sang à un intérêt. Alors certes, je n’ai pas subit ce que tu as subit, mais je sais ce que c’est d’être détesté pour ce qu’on est. » Dit-il, sans vraiment réfléchir à ce qu’il venait de dire sans réaliser ce qu’il venait de confesser. Ces quelques mots lui avaient malheureusement échappés sans qu’il ne puisse les retenir. Son regard se posa sur la jeune femme, remplit d’une très grande compassion.

Il posa doucement sa tasse près de lui, sur une table basse située devant la cheminée. « Mais tout ça, ce n’est pas vraiment très joyeux, n’est-ce pas ? » A nouveau, il fit son plus beau sourire, passant inconsciemment la main dans ses cheveux pour les remettre en place comme il en avait malheureusement prit l’habitude. S’il n’avait pas beaucoup de bonne nouvelle à donner, Sirius se sentait mieux aux côtés de la jeune femme, et il n’avait pas envie de gâcher ça en s’éternisant sur des sujets qui fâchent. « C’est vraiment délicieux, le chocolat. Je connaissais pas avant Poudlard. » On ne peut pas faire plus stupide, ressaisis toi Black ! Pensa-t-il. « Comment vas-tu ? »

Le problème, c’était qu’en plus des erreurs qu’il avait déjà commise, Sirius vivait dans la peur de celle qu’il s’apprêtait à commettre. Sans le savoir, Peyton venait de rappeler à son souvenir cette vague de responsabilité que le jeune homme portait maintenant sur ses épaules, et toutes les conséquences qu’auraient la moindre petite erreur. S’il faisait le moindre faux pas, il condamnerait tellement de personnes à la mort… « Et si j’étais un imbécile et que même si s’excuser ne suffisait pas à rattraper les choses ? J’ai été horrible avec certaines personnes, et je le serai certainement encore. Enfin, je suppose que ce n’est pas vraiment ce que tu as envie d’entendre, je t’en pris, pardonnes mes divagations. » Le jeune homme porta son regard sur la cheminée. Après tout, ce n’était véritablement un bon sujet de conversation. Il ne pourrait rien en dire à la demoiselle, et en parler, même à demi mot, ne l’aidait pas à calmer ses pires angoisses.

Habituellement, Sirius aurait prit un air faussement choqué, exagérant chacun de ses traits, et aurait répondu quelque chose de bateau jouant sur l’humour pour faire oublier une conversation bien trop sérieuse. Ce soir là, il se contenta plutôt de soupirer. « Dans le fond, je suppose que tu as raison. C’est triste, malgré tout. Il faut croire que l’injuste ignore les origines, les milieux, et les liens du sang… » Un soupire échappa au jeune homme, peut-être un peu trop sérieux pour sa réputation. Il posa ses yeux sur la demoiselle, lui parlant de chocolat. C’était stupide, et sans intérêt. Quelle image renvoyait-il de lui-même à cet instant ? Il sourit doucement en entendant la réponse de Peyton, soulagé qu’elle ne l’est pas prit pour un idiot. Que diraient ses parents s’ils le voyaient ainsi, partageant un chocolat chaud près du feu avec une née moldu ? D’imaginer Orion et Walburga le maudirent fit sourire le jeune homme avec un sourire bien plus sincère, cette fois. « Je l’ai toujours dit pourtant à mes parents ! Les moldus sont géniaux ! Seulement, rien à faire, ils ne veulent pas m’écouter. C’est une cause perdue. J’ai hâte de découvrir d’autre chose dans le monde moldu après Poudlard ! » Confia-t-il à Peyton, redevenant quelques instants l’adolescent insouciant de seize ans qu’il aurait du être s’il n’avait pas eu à ce soucier autant d’un avenir catastrophique.

Sirius s’était réellement détendu, et souriait sincèrement quand Peyton lui demanda comment se faisait-il qu’il connaissance son prénom. Le jeune ouvra la bouche un instant avant de la refermer, ne trouvant pas quoi répondre. Il prit une grande inspiration, cherchant les mots qui pouvait lui venir à l’esprit pour se justifier. « Et bien… Je suis déçu mademoiselle Dickson. J’attendais mieux de votre part ! Ne serais-je pour vous que Sirius le grand séducteur sans cervelle qui ne s’intéresse qu’à sa petite personne ? » Au moins, Sirius réussit à gagner quelques instants supplémentaire en répondant ainsi. La vérité, il ne pouvait pas lui dire. En réalité, il ne pouvait même pas se l’avouer à lui-même. Et puis, en y pensant, même si c’était vrai, il n’en dirait rien et tairait tout ça. Il n’avait pas le droit au bonheur. Comment pourrait-il être heureux quand il savait pertinemment que son petit frère allait mourir uniquement à cause de son égoïsme ?

« Je connais le nom de tous les élèves de Gryffondor, en réalité. J’avoue que j’ai encore du mal à retenir ceux des premières et quatrièmes années à Serdaigles et des troisièmes années Poufsouffles. Et puis ne le dis surtout pas à James, mais je connais même tous les noms de ceux des terminales à Serpentard ! » En soit, ce n’était pas réellement un mensonge. Sirius était un garçon beaucoup plus attentif et observateur qu’il ne voulait bien le laisser paraitre. Il était même bien plus attentionné que ce qu’on pouvait imaginer ! « Je ne suis pas sûr que ça soit utile, en revanche, mais vois-tu, je m’intéresse aux autres, je ne suis pas qu’un crétin malgré que ça me définisse plutôt pas mal. A mon tour de me confier quelque chose, du coup. N’est-ce pas ? »