Et si quelqu’un l’aperçoit ? Si quelqu’un la remarque, là, debout devant le comptoir ? Franchement, si on regarde bien Narcissa, elle n’a ni la tête, ni la réputation à trainer au Chaudron Baveur. Chaudron Baveur. Rien que le nom, cela ne va pas du tout à la petite blonde. Quand on prononce son nom, on pense plus à quelque chose se sophistiqué, de clair, de classe. Quelque chose à sa hauteur. Pas au Chaudron Baveur. Et à vrai dire, elle n’y a jamais mis les pieds. Elle a franchi pour la première fois ces vulgaires portes, et déjà, elle regrette. Le regret, ce sentiment amer qu’on ne lui a jamais appris. Elle le ressent souvent, sans pouvoir mettre un mot là-dessus, évinçant d’office toute chose pouvant y ressembler.

Lucius lui avait demandé d’y passer. Ou plutôt, il lui avait fait comprendre qu’il fallait qu’elle y passe. En jouant aux épouses parfaites, Cissy avait appris à dire oui trop facilement, alors lorsqu’elle devait rendre service à son humble mari, ce dernier commençait à ne même plus prendre la peine de demander. Et en même temps, Cissy est tellement dévouée à sa famille, aux siens, qu’il ne lui vient jamais à l’esprit de dire non. Donc où est le problème à ça ? À ce qu’on ne lui demande plus son avis ?

Elle ne sait même pas ce qu’elle attend. Elle ne sait même pas si elle attend de voir si ce pauvre sorcier se prétendant fidèle au Seigneur des Ténèbres alors qu’il est né-moldu, allait se pointer, ou sil elle attendait qu’on lui transmette quelque chose. Pathétique. Elle fait tellement tâche sur le tableau, que la situation en est presque drôle. Elle souffle. Laissant ainsi échapper une once de sentiment. Elle se ressaisit, elle vaut mieux que ça.

On lui propose une Bière au beurre. Elle accepte. Personne n’imagine Cissy une Bière au beurre à la main, mais elle n’est plus à ça prêt aujourd’hui. Elle boit une gorgée. Elle sent l’amertume dans sa gorge, elle tousse, puis relève la tête. Elle ne se rappelle pas avoir bu ce genre de breuvage…  Lorsqu’elle tourne la tête, elle croit apercevoir Sirius, son cousin. Elle esquisse un sourire, puis boit une nouvelle gorgée, non sans grâce. Peut-être qu’à force, elle ne tient plus l’alcool. Elle tourne de nouveau la tête, il est encore là. Elle tente de masquer un soupire. Elle boit une nouvelle gorgée, puise pose sa choppe sur le comptoir.
Elle se doute bien que Sirius ne viendra pas vers elle. Qu’il aille au diable, avec ces sangs de bourbes et ces salles traitres. Elle boit de nouveau une gorgée. Il est toujours là, et il n’a pas fait un pas vers elle. Elle vide sa choppe, toujours avec une certaine retenue. Elle ne veut pas ternir sa réputation.  

Puisqu’il reste à sa place, Cissy s’approche de lui. Elle repense à son enfance, à ces moments de complicités avec son cousin. Et puis elle repense aux dernières années qu’elle a passé à Poudlard, aux remarques désobligeantes de Sirius. Dire qu’elle a failli s’adoucir face à lui.

« Sirius. J’ai presque cru que tu allais continuer à m’observer, de loin. »

Elle sourit. Histoire d’en rajouter, histoire d’essayer de le mettre mal à l’aise. Elle se doute bien que cela ne marchera pas, Sirius est une forte tête.

« Tu n’es même pas venu dire bonjour à ta cousine préférée »

Elle parle trop. Plus que d’habitude.